Certaines mauvaises mains reprochent aujourd’hui à la bande
dessinée d’être un art onéreux si l’on rapporte son prix au kilo… En ces temps
difficiles nous avons une heureuse nouvelle pour les plus économes : Craig
Thomson leur donne l’occasion d’investir dans un pavé qui leur fera ressentir
tout le poids de la culture…
Non seulement Habibi
approche les 700 pages d’un papier épais, mais chacune de ces planches
fourmille en plus de détails méticuleux et de motifs étourdissants sur
lesquels le regard peut se perdre à
foison. L’épopée qui nous est contée ici est celle d’un amour maternel,
fraternel, puis passionnel entre deux enfants que la vie va séparer, puis
retrouver. L’œuvre oscille alors entre le drame social et l’essai ésotérique tout
en dissimulant sous un voile le refrain d’un chant érotique.
Chacune des grandes scènes de la vie des protagonistes est
assimilée à des mythes religieux, chacune des Histoires se complétant en se
confondant. Les dessins sont d’une grande exigence mais laissent parler la
passion de leur auteur, faisant flotter son crayon dans une impulsion
contrôlée.
Certains dessins surprennent aussi par leur audace : frôlant
parfois le mauvais gout, fleuretant avec le kitch, plusieurs métaphores à peine
filées pourraient même paraître bien grossières si la sincérité de leur auteur
ne les sauvait pas d’un fiasco annoncé.
Habibi s’amuse
enfin avec les genres, doté d’une dramaturgie maniaque, et d’une beauté
contrastée. Plus qu’une histoire de religion, Thomson nous parle de croyances
et de légendes. Peu importe où soit Dieu finalement, l’important est qu’il nous
raconte des histoires.
Puisse les Djinns garder le reste pour eux.
Brrr !
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